archipel
11.04 — 6.07.2025

Téo BECHER
Alberta crude

  • Alberta crude (2019 - 2023)

    Ce projet concerne la province de l’Alberta, au Canada, principalement autour des deux villes d’Edmonton et Calgary. L’Alberta pourrait se comparer au Texas canadien, une province conservatrice productrice de pétrole (le Canada en est le 3e réserve mondiale), constituée principalement de grandes plaines et de “rolling hills”. La très grande partie des opérations pétrolières de l’Alberta se situe dans l’extrême nord de la province, autour des gisements de sables bitumineux, un pétrole que l’on trouve mélangé à des sables et qu’il faut donc « nettoyer », rendant son exploitation très polluante.

    Avec ce projet, l’idée consiste à suivre des pistes de réflexion que j’ai développées dans des travaux précédents autour de notre rapport à la nature, de la séparation entre nature et culture et de l’exploitation du paysage qui en découle. Ici, le paysage canadien et le rapport qui y est entretenu apparaissent comme un cas extrême dans l’ambivalence entre protection de la nature et son exploitation. Petit à petit, l’idée de travailler autour des deux villes Edmonton et de Calgary a émergé car elles représentent un système de rapport au monde capitaliste et d’exploitation qui entre en contradiction totale avec l’histoire du territoire qu’est aujourd’hui le Canada et les cosmologies autochtones qui l’habitent. De plus, se pencher sur la ville dans le cadre du paysage canadien m’intéresse car cela va à contre-courant de l’image qu’on se fait du Canada comme réserve naturelle intouchée et intouchable ; questionner ces représentations me semble pertinent, toujours dans une mise en perspective du paradigme occidental.

    Le Canada est un état colonial fondé sur l’exploitation des ressources (commerce des fourrures, exploitations minières, bois, pétrole, gaz, uranium, etc.) qui, en parallèle, a servi à justifier la présence des colons et sert encore aujourd’hui à consolider les bases d’une fierté culturelle constitutive de l’identité canadienne. La présence et la puissance des représentations liées au pétrole dans la culture albertaine est frappante et c’est en partie ce qui constitue le cœur de ce projet. L’idée est de remonter ces différents fils (le pétrole, le settler colonialism, le rapport à l’histoire) pour voir comment tout cela a formé le Canada aujourd’hui et tenter d’y lire en transparence ce que cela dit de notre rapport au monde et à la nature.

  • Alberta crude (2019 - 2023)

    Alberta Crude focuses on the province of Alberta, Canada, primarily around the cities of Edmonton and Calgary. Alberta could be compared to the Canadian Texas—a conservative, oil-producing province (Canada holds the third-largest oil reserves in the world), characterized by vast plains and rolling hills. The majority of Alberta’s oil operations take place in the far north of the province, around the tar sands deposits—a type of oil mixed with sand that requires extensive processing, making its extraction highly polluting.

    With this project, I aim to extend the lines of thought I have explored in previous works regarding our relationship with nature, the divide between nature and culture, and the resulting exploitation of landscapes. Here, the Canadian landscape and the way it is managed present an extreme case of the contradiction between environmental preservation and resource exploitation.

    Over time, I was drawn to working around the cities of Edmonton and Calgary, as they embody a capitalist system of resource extraction that starkly contrasts with the history of the land now known as Canada and the Indigenous cosmologies that have shaped it.

    Moreover, exploring the city within the context of the Canadian landscape interests me because it challenges the widespread perception of Canada as an untouched and untouchable natural reserve. Questioning these representations seems relevant, as it helps put the dominant Western paradigm into perspective.

    Canada is a colonial state built on resource exploitation (fur trade, mining, logging, oil, gas, uranium, etc.), which has historically served to justify settler presence and continues to reinforce a sense of national pride integral to Canadian identity. The presence and power of oil-related imagery in Albertan culture is striking, and this is a central focus of my project. The goal is to trace these different threads—oil, settler colonialism, and historical narratives—to understand how they have shaped present-day Canada and, in doing so, reveal deeper insights into our relationship with the world and nature.

Lukas DOULSAN
Le chagrin des Belges

  • Le chagrin des Belges

    C’est un article de La Libre Belgique qui est à l’origine de ce récit photographique : « Pourquoi ce monument à la gloire des Waffen SS à Zedelgem ? ». Je me suis rendu à Zedelgem, puis dans d’autres villes flamandes, à la recherche des empreintes du nationalisme dans ce territoire où il est profondément ancré. Aux élections régionales de 2019, le Vlaams Belang et la Nieuw-Vlaamse Alliantie ont raflé à eux seuls plus de 40 % des voix.

    Des cimetières où les tombes d’anciens collaborateurs sont entretenues et célébrées. Une caserne militaire dans laquelle un terroriste d’extrême-droite a volé des armes lourdes avant de passer à l’acte. Sur une place quelconque, la non moins anodine statue d’un poète qui inspira le mouvement flamand à la fin du XIXe siècle... À mesure que j’avance dans mon enquête, les racines historiques du nationalisme surgissent des pavés que je foule. Le Centre des Archives Nationalistes d’Anvers sera un des lieux pivots pour m’aider à comprendre l’épaisseur de ce que je vois.

    Quelques rencontres m’accompagnent dans la traversée de ce paysage funeste : à l’intérieur d’un bar, je fais la connaissance de S., immigré sénégalais en train de se faire agresser. Au « Vlaams Radikaal », j’observe des élus d’extrême-droite draguant leur électorat avec de la bière bon marché.

    Le présent se teinte d’une violence rampante. Tout autant que des preuves visibles, ce sont des sensations, celle des mauvais rêves et des réveils inquiétants, qui me sont apparues à travers ces images.

  • Le chagrin des Belges

    This photographic narrative was sparked by an article in La Libre Belgique: “Why is there a monument glorifying the Waffen SS in Zedelgem?” I traveled to Zedelgem and then to other Flemish cities in search of the traces of nationalism in this deeply rooted territory. In the 2019 regional elections, Vlaams Belang and the Nieuw-Vlaamse Alliantie together won more than 40% of the vote.

    Cemeteries where the graves of former collaborators are maintained and honored. A military barracks where a far-right terrorist stole heavy weapons before carrying out an attack. In an otherwise unremarkable square, the seemingly innocuous statue of a poet who inspired the Flemish movement in the late 19th century… As my investigation progressed, the historical roots of nationalism emerged from the very cobblestones I walked upon. The Nationalist Archives Center in Antwerp became a pivotal location in helping me grasp the depth of what I was witnessing.

    A few encounters accompanied me through this bleak landscape: inside a bar, I met S., a Senegalese immigrant in the middle of being assaulted. At the Vlaams Radikaal, I watched far-right politicians courting their electorate with cheap beer.

    The present is tinged with a creeping violence. More than just visible evidence, it is the sensations—those of bad dreams and unsettling awakenings—that appeared to me through these images.

Natalia MAJCHRZAK
Swizzles and Twizzles

  • Swizzles and Twizzles

    Swizzles and Twizzles suit Natalia MAJCHRZAK alors qu’elle incarne un personnage fictif poursuivant désespérément son rêve de devenir une célèbre patineuse artistique. À travers un mélange d’images personnelles et d’archives trouvées, elle alterne entre les rôles de photographe, de performeuse et de chercheuse, brouillant ainsi les frontières entre ces identités.

    À première vue, le projet présente une série de récits troublants, presque délirants, où le personnage lutte pour correspondre à un idéal. Symboliquement, l’œuvre explore la peur de la fugacité, tissant des thèmes de fétichisation de la célébrité et d’obsession pour la jeunesse tout en interrogeant la photographie comme un éventuel vecteur d’immortalité.

    Le projet a commencé avec la fascination personnelle de Natalia MAJCHRZAK pour le patinage artistique. Elle a mené des recherches obsessionnelles sur ce sport et a documenté les patineurs de la patinoire Antarctica à Anvers. Au fil de ses recherches, elle a pris conscience que réaliser son rêve de devenir patineuse artistique professionnelle serait presque impossible en raison de son âge. En 2024, l’annonce de la fermeture et de la démolition définitive de la patinoire a été faite. Natalia MAJCHRZAK a alors capturé l’atmosphère apocalyptique de la patinoire abandonnée avant de documenter sa démolition.

  • Swizzles and Twizzles

    Swizzles and Twizzles follows Natalia MAJCHRZAK as she embodies a fictional character desperately pursuing its dream of becoming a famous figure skater. Through a blend of original images and found footage, she transitions between the roles of photographer, performer, and researcher, blurring the boundaries between these identities. At first glance, the project presents an array of haunting, almost delusional narratives, as the character struggles to fit into an idealized mold. Symbolically, the work explores the fear of transience, weaving themes of fame fetishization and obsession with youth into the storyline, while also researching photography as a potential vessel for immortality.

    The project began with Natalia MAJCHRZAK’s personal fascination with figure skating. She obsessively researched the sport and documented skaters at the Antarctica Ice Rink in Antwerp. During her research, she realized that achieving her dream of becoming a professional figure skater would be nearly impossible due to her age. In 2024, it was announced that the rink would be permanently closed and demolished.

Justine MENGHINI & Hugo ISTACE
L28

  • L28

    Situé le long du canal, à la lisière du centre historique de Bruxelles, le site de Tour & Taxis est une ancienne plateforme de logistique industrielle ayant connu d’importantes activités au cours du 20e siècle. Toutefois, le site se transforme en un vaste espace en friche causé par la désindustrialisation, jusqu’à son acquisition par deux sociétés immobilières privées qui entreprennent un important projet de réaménagement urbain. Ainsi, deux nouveaux espaces verts voient le jour : le parc de Tour & Taxis et le parc L28. L28 s’articule en trois phases, chacune explorant le même territoire sous des perspectives distinctes. Ces phases retracent l’évolution d’un regard sur les diverses formes d’appropriation de l’espace ainsi que les dynamiques de pouvoir à l’œuvre sur le site de Tour & Taxis.

    PHASE 1 :
    En juillet 2021, suite à une longue période de confinements successifs, les rues, places et parcs sont à nouveau très fréquentés. Quelques mois auparavant, Hugo emménage dans un quartier voisin, le parc L28 situé sur les communes de Laeken et de Molenbeek qui fait la jonction entre nos domiciles. Le parc devient pour nous un lieu habituel de passage et de rencontre. En découvrant ses espaces, tout en observant les personnes qui s’y rassemblent, nous développons un attachement pour ce lieu et le désir d’y réaliser des images. Ce territoire se trouve en grande partie investi par les habitants des quartiers avoisinants, qui le temps de quelques heures, voilent les limites entre l’espace public et lieu intime. Les jeunes s’y retrouvent fréquemment : c’est l’un des rares endroits où ils peuvent se réunir en dehors des cadres scolaires et familiaux. Nous utiliserons le médium photographique pour explorer un environnement immédiat en développant un regard sur les diverses formes d’appropriation de l’espace par les jeunes, les relations qui s’y tissent et l’attachement pour cet endroit où les corps comme l’espace se transforment.

    PHASE 2 :
    Au cours des premiers mois de la réalisation du travail, nous observons de nombreux travaux en cours sur le site de Tour & Taxis, qui contribuent à l’évolution rapide du paysage. Des recherches nous révèlent que ce site, autrefois industriel puis devenu friche urbaine, est désormais au cœur d’un vaste projet de réaménagement. L’ambition de la ville de Bruxelles et des promoteurs immobiliers privés “Nextensa” vise à transformer ce lieu en un symbole de la ville de demain, alliant durabilité et intelligence, mais surtout un espace économiquement attractif. Avec le soutien des autorités locales, ce projet ouvre également des perspectives de spéculation foncière. Cette deuxième phase de travail s’attache à dresser le portrait d’un lieu en portant un regard sur la réunion des différentes strates qui forment cet aménagement urbain : les friches, les derniers terrains vagues – espaces encore vacants, les zones de chantier en cours, les nouvelles infrastructures ainsi qu’une attention particulière pour les marques déposées par l’activité humaine sur le sol et le paysage. Lors de nos nombreuses déambulations, nous observons la métamorphose de ce lieu et tentons de déconstruire la théâtralisation d’un discours politique.

    PHASE 3 :
    Tout au long du processus de création de ce travail, nos recherches transforment notre perception du site et suscitent de nouveaux questionnements. Bien que Tour & Taxis soit aujourd’hui au centre de stratégies politiques et économiques de réaménagement urbain, il demeure avant tout un espace de vie. En effet, les différentes zones qui le composent forment un territoire animé, façonné et investi par ses usagers. L’ensemble des pratiques quotidiennes, les vécus sensibles, les expériences et les mémoires des occupants participent à la création continue de ce lieu, au-delà de sa simple planification, et contribuent à le réinventer tout au long de son évolution socio-spatiale. Lors de cette troisième phase de travail, nous décidons de réintroduire le corps humain au cœur des espaces pour questionner sa présence au sein de ce territoire en mutation, ainsi que les enjeux d’appropriation et de dépossession qui en découlent. À travers ces images, nous souhaitons mettre en lumière le lien intime entre l’individu et son environnement, tout en soulignant le potentiel subversif que représente le simple fait d’occuper un lieu.

  • L28

    Located along the canal, on the edge of Brussels’ historic center, the Tour & Taxis site is a former industrial logistics hub that was highly active throughout the 20th century. However, due to deindustrialization, the site gradually turned into a vast wasteland until it was acquired by two private real estate companies, which undertook a major urban redevelopment project. As a result, two new green spaces emerged: Tour & Taxis Park and L28 Park. L28 is structured into three phases, each exploring the same territory from different perspectives. These phases trace the evolution of our perception of the various forms of spatial appropriation and the power dynamics at play at Tour & Taxis.

    PHASE 1
    In July 2021, following a long period of consecutive lockdowns, streets, squares, and parks became lively again. A few months earlier, Hugo had moved to a nearby neighborhood, and L28 Park—located between the municipalities of Laeken and Molenbeek—became a regular meeting point for us. As we explored its spaces and observed the people who gathered there, we developed an attachment to this place and a desire to document it through photography. This space is largely occupied by residents from the surrounding neighborhoods, who, for a few hours, blur the boundaries between public space and intimate place. Young people gather there frequently—one of the few locations where they can meet outside of school and family settings. We used photography as a medium to explore our immediate environment, developing a perspective on the various forms of spatial appropriation by young people, the relationships that unfold there, and the deep connection to a place where both bodies and space transform.

    PHASE 2
    During the early months of our work, we observed numerous construction projects reshaping the Tour & Taxis site, contributing to its rapidly evolving landscape. Our research revealed that this site—once industrial, then abandoned—was now at the heart of a large-scale redevelopment project. The City of Brussels and private real estate developers «Nextensa» aim to transform the area into a symbol of the city of the future, combining sustainability, intelligence, and—above all—economic attractiveness. With support from local authorities, this project also opens the door to real estate speculation.

    This second phase of our work seeks to portray this place by capturing the layers that shape its urban transformation: abandoned lots, the last remaining vacant spaces, active construction sites, new infrastructure, and traces of human activity left on the ground and landscape. Through our many walks, we document the metamorphosis of this place and attempt to deconstruct the staged political discourse surrounding its redevelopment.

    PHASE 3
    Throughout the creative process, our research transformed our perception of the site, leading to new questions. Although Tour & Taxis is now at the center of political and economic strategies for urban redevelopment, it remains, above all, a living space. The different areas that make up the site create an animated territory, shaped and inhabited by its users. Daily practices, personal experiences, and collective memory continuously shape this place, going beyond mere urban planning and contributing to its evolving socio-spatial identity.

    For this third phase, we chose to reintroduce the human body into the spaces, questioning its presence within this shifting territory, as well as the issues of appropriation and dispossession that arise. Through these images, we aim to highlight the intimate relationship between individuals and their environment, while emphasizing the subversive potential of simply occupying a space.

Pierre VANNESTE
L’empreinte toxique du phosphate

  • L’empreinte toxique du phosphate

    L’industrie du phosphate est un problème mondial. Partout où elle s’installe avec ses déchets, elle crée un désastre environnemental. Que cela soit dans la mer ou à terre. C’est un produit qui génère tant de résidus qu’il devrait être banni. Paco García - habitant de Huelva, Espagne

    Il y en a dans le Coca, les lessives, les détergents, les médicaments, les cosmétiques, les industries textile, pétrochimique et alimentaire. Mais surtout dans les engrais chimiques (90 % de la production mondiale). Cet ingrédient, c’est le minerai de phosphate transformé en acide phosphorique.

    Tout comme pour les pesticides, la production et l’utilisation d’engrais phosphatés en agriculture intensive entraînent la contamination des sols et des risques de santé publique.

    Née au milieu du XIXe siècle en Europe et aux États-Unis, cette industrie chimique s’est largement répandue et a profondément transformé les pratiques agricoles. Pendant près d’un siècle, promotion des engrais phosphatés. Après la Seconde Guerre mondiale, leur usage se généralise dans les pays occidentaux. La « révolution verte » est amorcée. Mais derrière ce modèle agricole se cache une contamination massive de l’air, des sols, des nappes phréatiques et des cours d’eau aux métaux lourds (cadmium, mercure, arsenic, etc.) et éléments radioactifs (thorium, uranium, radium, radon). Dans les champs, les sols dépérissent, tandis que tout autour des usines de production, les déchets chimiques s’entassent et le nombre de cancers, de maladies osseuses, dentaires et respiratoires alertent scientifiques et citoyens.

    Si en Belgique, en Espagne et en France, les usines chimiques de transformation du phosphate ont progressivement fermé abandonnant derrière elles leurs déchets, en Tunisie et au Sénégal, elles sont toujours en activité et continuent de contaminer irréversiblement les territoires.

    Au fil de nos rencontres et de nos recherches, nous nous sommes rendus compte que ce n’était pas tant le savoir environnemental, médical et juridique sur le caractère toxique de ces industries qui manquait, mais bien une mise en dialogue des expériences et des territoires permettant de saisir l’ampleur du phénomène. Avec le temps, les mémoires s’érodent et les déchets industriels, invisibilisés dans le paysage, tombent dans l’oubli.

    Telles des pièces à conviction, témoignages, portraits, objets et fragments de résidus se croisent pour dessiner les contours d’une pollution invisible. Celle d’un monde qui repose sur la production et l’utilisation de produits chimiques pour maximiser ses rendements ; révélant peu à peu une mutation que nous côtoyons tous sans jamais vraiment la percevoir.

  • L’empreinte toxique du phosphate

    The phosphate industry is a global problem. Wherever it establishes itself, it brings environmental disaster with its waste—whether in the sea or on land. It is a product that generates so much residue that it should be banned.
    Paco García - habitant de Huelva, Espagne

    It’s found in Coca-Cola, detergents, cleaning products, medicines, cosmetics, and the textile, petrochemical, and food industries. But above all, 90% of global production is used in chemical fertilizers. This ingredient is phosphate ore, transformed into phosphoric acid.

    Just like pesticides, the production and use of phosphate fertilizers in intensive agriculture lead to soil contamination and public health risks.

    Born in the mid-19th century in Europe and the United States, this chemical industry rapidly expanded and profoundly reshaped agricultural practices. For nearly a century, phosphate fertilizers were heavily promoted. After World War II, their use became widespread in Western countries, marking the beginning of the «Green Revolution.» But behind this agricultural model lies massive contamination—of the air, soil, groundwater, and waterways—with heavy metals (cadmium, mercury, arsenic, etc.) and radioactive elements (thorium, uranium, radium, radon). In the fields, soils deteriorate, while around fertilizer factories, chemical waste piles up, and rising cases of cancer, bone diseases, dental issues, and respiratory illnesses raise alarms among scientists and citizens alike.

    In Belgium, Spain, and France, phosphate processing plants have gradually shut down, leaving behind toxic waste. But in Tunisia and Senegal, these factories are still in operation, continuing to irreversibly contaminate their surroundings.

    Through our encounters and research, we realized that the issue isn’t a lack of environmental, medical, or legal knowledge about the toxicity of these industries. Rather, it’s the absence of a dialogue connecting different experiences and regions, making it difficult to grasp the full scale of the phenomenon. Over time, memories fade, and industrial waste—rendered invisible in the landscape—slips into oblivion.

    Like pieces of evidence, testimonies, portraits, objects, and fragments of residues come together to outline the contours of an invisible pollution. A world built on the production and use of chemicals to maximize yields—gradually revealing a transformation that we all live alongside, yet rarely perceive.

Nick VERHAEGHE
The Depth of Stone

  • The Depth of Stone

    Série photographique expérimentale, ce projet explore l’interaction entre la décomposition organique et la permanence historique au sein des grottes de marne des Pays-Bas et de la Belgique. En capturant les structures artificielles et les marques laissées sur ces pierres anciennes, la série met en lumière l’histoire stratifiée de ces cavernes, depuis leur formation à l’ère des dinosaures jusqu’à leur utilisation comme refuge en temps de guerre et leur transformation en fermes de champignons modernes.

    Grâce à l’utilisation de la photographie au flash et de révélateurs photographiques à base de plantes dérivées de champignons et d’autres végétaux présents dans les grottes, les images reflètent la double nature de ces espaces, à la fois capsules temporelles et environnements vivants. La technique consistant à intégrer des matériaux végétaux dans le processus photographique fait écho aux cycles organiques de vie et de mort qui se déroulent dans ces cavernes, tout en rappelant les traces laissées par l’humanité sur la pierre.

    Cette série entremêle les langages visuels de l’archéologie, de l’anthropologie et de la photographie pour explorer la frontière fragile entre décomposition et conservation, permanence et impermanence. À travers un processus rituel de capture, de développement et de réinterprétation des images des grottes, cette série propose une réflexion contemplative sur le désir humain d’archiver l’histoire, tout en reconnaissant l’inévitable emprise de l’entropie.

    Ma motivation personnelle pour cette série découle d’une fascination de toujours pour l’histoire, l’archéologie et les récits cachés inscrits dans le monde physique qui nous entoure. Les grottes de marne de Maastricht, avec leur histoire stratifiée, des fossiles préhistoriques aux sculptures humaines, me captivent car elles représentent un point de rencontre unique entre l’histoire naturelle et l’histoire humaine. J’ai toujours été attiré par les lieux imprégnés du poids du temps, où la frontière entre passé et présent s’efface. Enfant, je rêvais de devenir archéologue, d’exhumer des histoires oubliées. Ce projet me permet de renouer avec cette passion tout en intégrant ma pratique artistique, en alliant photographie et profond respect pour le passé. En utilisant des techniques expérimentales telles que des révélateurs à base de plantes et l’impression en relief sur plâtre, je peux intégrer l’histoire organique des grottes à mon travail, établissant ainsi un lien direct entre l’environnement et le médium.

    Ce projet ne se limite pas à documenter les grottes—il s’agit d’interagir avec elles, de créer un lien tangible entre passé et présent, et d’explorer comment le temps, la décomposition et la mémoire façonnent notre compréhension de l’histoire.

    Pour cette série, j’ai développé les négatifs photographiques à l’aide d’un révélateur unique à base de plantes, composé de champignons et d’autres végétaux qui poussent dans des environnements à faible luminosité, comme ceux des grottes. Cette approche reflète les cycles organiques de vie et de mort, ces plantes façonnant littéralement le film qui capture l’essence des grottes. Grâce à la photographie au flash, j’ai pu révéler les moindres détails des sculptures humaines et des textures naturelles nichées dans l’obscurité des cavernes, donnant aux images un aspect brut et granuleux qui fait écho à l’histoire des lieux.

    En plus des négatifs, j’ai réalisé des photogrammes en plaçant directement sur du papier photosensible des restes squelettiques d’animaux tels que des poissons et des lapins. Ces formes osseuses, en résonance avec les fossiles incrustés dans les parois des grottes, ont été exposées à un flash de lumière, laissant derrière elles des empreintes spectrales. Les photogrammes, tout comme les négatifs, ont été développés avec ma formule à base de plantes, renforçant ainsi le lien entre les matériaux utilisés dans le processus et l’environnement dont ils sont issus.

  • The Depth of Stone

    Is an experimental photographic series that delves into the interplay between organic decay and historical permanence within the Dutch & Belgium marl caves. Capturing the man-made structures and markings left in these ancient stones, the series draws on the caves’ layered history—ranging from their formation during the age of dinosaurs to their use as wartime refuges and modern-day mushroom farms. Utilizing flash photography and plant-based film developers derived from fungi and other cave flora, the images reflect the caves’ dual nature as both time capsules and living environments.

    The technique of embedding plant materials into the photographic process mirrors the organic cycles of life and death within the caves, as well as the remnants of humanity etched into the stone. This series intertwines the visual language of archaeology, anthropology, and photography to explore the fragile boundary between decay and preservation, permanence and impermanence. Through a ritualistic process of capturing, developing, and reinterpreting the cave imagery, this series offers a contemplative reflection on the human desire to archive history while acknowledging the inevitability of entropy.

    My personal motivation for this series stems from a lifelong fascination with history, archaeology, and the hidden narratives embedded in the physical world around us. The Maastricht marl caves, with their layered history—from prehistoric fossils to human-made carvings—captivate me because they represent a unique intersection between natural and human history. I’ve always been drawn to places that hold the weight of time, where the boundaries between the past and present blur.

    As a child, I dreamed of being an archaeologist, uncovering forgotten histories. This project allows me to tap into that early passion while integrating my artistic practice, merging photography with a deep respect for the past. By using experimental techniques such as plant-based developers and plaster relief printing, I’m able to bring the organic history of the caves into my work, connecting the environment directly to the medium.

    This project is not just about documenting the caves—it’s about engaging with them, creating a tangible link between the past and the present, and exploring how time, decay, and memory shape our understanding of history.

    For this series, I developed the photographic negatives using a unique plant-based developer made from mushrooms and other plants that grow in low-light environments, like those found within the caves. This approach reflects the organic cycles of life and death, as these plants shape the very film that captures the cave’s essence. By using flash photography, I was able to bring out the intricate details of the man-made carvings and natural textures within the dark, shadowy spaces of the caves, giving the images a gritty and raw feel that mirrors the caves’ history.

    In addition to the negatives, I created photograms by placing skeletal remains of animals such as fish and rabbits directly onto light-sensitive paper. These skeletal forms, echoing the fossilized remains embedded in the cave walls, were illuminated by a flash of light to leave behind their ghostly impressions. The photograms, like the negatives, were developed using my plant-based formula, further connecting the materials used in the process to the environment from which they were sourced.